Le jeu de la mort
Un roman de David
Almond, publié chez Gallimard,
en 2003,
dans la collection Scripto. Traduit de
l'anglais.
Kit Watson, 13 ans, vient
d'arriver dans le village de sa famille.
Comme
John Askew, il est d'une famille de mineurs. D'ailleurs, leurs noms
sont gravés sur la
pierre
érigée à la mémoire des
cent dix-sept
mineurs morts à Stoneygate, dans l'explosion de lamine, en
1821.
Askew l'attire dans un groupe pour jouer au jeu de la mort. Ils se
rassemblent dans une sorte de grotte, John est le maître de
la
cérémonie. Il fait tourner un couteau et tous les
jeunes murmurent mort,
mort, mort…
S'arrêtant, la pointe du couteau
désignera celui qui
mourra. Ses copains quittent alors la grotte, l'abandonnant
à
son sort, le laissant seul. Quand il sort, il a la certitude qu'il a
été mort et qu'il a vu les enfants.
Au cours de cet étrange compagnonage, Kit et John vont
croiser
des fantômes, ceux de leurs ancêtres lorsqu'ils
étaient encore enfants. Askew disparaît, puis
réapparaît. Sa famille est impuissante
à faire
quelque chose de positif pour lui. Il semble perdu, et Kit est son
point de repère.
Le grand-père de Kit est au plus mal. Il se bat
pour prolonger sa vie. Il raconte la mine à son petit-fils :
il m'emmena en
promenade et me montra les traces de la présence de
l'ancienne mine partout dans Stoneygate (...)
- Tu regardes
cette colline et tu penses qu'elle est pleine. Mais si tu y descendais
plus profondément, tu verraie qu'elle est criblée
de galeries. Un dédale ! Un vrai labyrinthe !
Au cours de nos
promenades, je lui posais mille questions qui le faisaient
sourire : (...)
- Nous descendions
très profondément, Kit. Il faisait un noir
d'encre? Nous étions tous terrifiés (...)
- Mais il y avait
autre chose que la peur, Kit. La mine nous attirait. Nous savions que
c'était notre destin. Il y avait cette joie toute
particulière à glisser ensemble dans cette
obscurité qui nous effrayait. Et puis, par dessus tout, il y
avait le bonheur de remonter ensemble à la surface, dans un
monde magnifique...
Un jour d'hiver. le grand-père mourut.
La vie ne s'est pas arrêtée pour autant.
La famille de John Askew s'est stabilisée. Il est revenu
à l'école. Il a illustré l'histoire
que Kit avait écrit. Le souvenir du grand-père
est resté vivant. Allie, Askew, Kit et leur chien ont
continué à parcourir la lande de Stoneygate...
C'est à la fois
un roman fantastique et un roman noir.
Un roman fantastique
à cause des
expériences de mort inexplicables, de la vison des enfants,
de ces
fantômes qui hantent la vie des héros, des
disparitions
soudaines...
Roman noir parce que l'ambiance est triste,
désespérante,
glauque. C'est un tiers-monde avec des gens pauvres et frustres.
Il y a cependant des moments plus lumineux, dans l'amitié
forte
qui unit Kit et Askew, dans l'affection amoureuse d'Allie pour Kit et
dans le souci qu'elle a de lui, dans la relation qui unit Kit
à
son grand-père qui se bat pour vivre encore un peu.
C'est une lecture forte et
dérangeante. Sans doute parce que dans ce jeu, les enfants
défient la mort. Ils l'affrontent, la risquent. Sans doute
aussi parce qu'il est question de transmission d'un
héritage, celui de la mine qui est fermée, qui
est comme morte et qui pourtant, continue d'influencer le cours de la
vie de ceux qui habitent à Stoneygate. Et il y a
l'amitié, des deux héros, une
fraternité qui ne s'installe pas de suite, qui
s'éprouve, qui se teste avant que d'exister pour
toujours. Leurs vies sont liées. Au début, ils ne
le savent pas, ils ne savent pas qu'ils ne peuvent vivre l'un sans
l'autre.
Le livre fermé, l'histoire continue
de
hanter la mémoire du lecteur. Peut-être parce que
tout au long de ces pages, il a partagé l'incertitude des
personnages qui ne savent pas toujours s'ils vivent dans la
réalité ou le rêve. Reste que la
vison leur vision de la vie
s'étend
au-delà
de la mort : Je sais
que, tant
qu’il y aura des enfants qui plisseront les yeux, nous
marcherons
là pour l’éternité.
Ce roman bizarre et
compliqué plaira aux garçons
et filles à partir de 12-13 ans.
©
Jean TANGUY 19 mars 2006
|