|
Un roman de Louis Atangana, publié
aux Editions du Rouergue, en 2003, dans la collection doAdo.
D'abord, il y a Julien, qui n'en finit pas de zapper le collège.
Il ne supporte plus sa mère et encore moins son nouvel ami. Alors
Julien erre des jours entiers, traîne avec un clochard perdu dans
ses rêves, évite toutes les discussions avec sa mère...
Ensuite, il y a Fatimatou, une fille au caractère pas commode,
très changeant. De jolies tresses. Son père veut la marier
à un vieux de 32 ans. "C'est la traditon" dit-il
. Comme au Mali. Elle n'en veut pas, de ce type qu'on lui impose. Elle
veut choisir celui qu'elle aimera. Elle veut poursuivre ses études.
Son père ne la comprend pas. Il la bat souvent.
Ensuite, il y a cette cavale. Obligée. Fatmatou s'est fait aider
par ses copains du quartier pour faire peur à ce type qu'elle ne
veut pas pour mari. Son père l'a battue plus que de coutume, l'a
enchaînée dans sa chambre. Au bout de quelques jours, ses
jeunes soeurs ont volé les clefs. Elle s'est enfuie.
Donc, ils partent. Vers le sud, vers le bord de mer. Là où
Julien a habité avec ses parents avant qu'ils ne se séparent.
Il ne reconnaît plus rien de la ville. Ils logent dans un hôtel
miteux. Un hôtel rempli de filles. Surtout de l'Est. Quelques
Africaines. A peine plus âgés qu'eux. Ils testent leur
liberté nouvelle. Fatimatou fait le point sur sa vie. Julien s'essaie
au travail dans des serres Parce qu'il avait besoin d'argent. Parce
qu'il fallait qu'il se prouve qu'il était capable de ce débrouiller.
Tout seul. Sans personne. C'est pour ça qu'il y retournait au travail,
à se faire traiter comm un chien. A se sentir salle et vide. Moins
que zéro (...) Les autres étaient là. Autour de lui.
L'aidaient à tenir. Lui montraient comment faire. Avec la même
patience. On parlait peu. Pas le temps. Certains mots ne se disaient pas.
Juste un regard. Ca suffisait.
Quand l'argent est venu à manquer, il a fallu repartir. Fatimatou
est allée dans un foyer et a retrouvé le collège.
Julien a encore zoné quelques jours avant de retrouver sa mère
et le collège.
Puis la fin de l'année est arrivée. Le dernier spectacle.
La séparation toute proche. Ne restent que les beaux souvenirs
de cette tranche de vie avec Fatimatou. Bientôt, il sera sans elle.
Aux Editions du Rouergue, on aime bien
ces romans secs et durs. Ces textes qui semblent écrits à
la serpe, jetés avec rage sur le papier et qui parlent d'une vie
difficile vouée à tous les échecs. Une vie qui, pourtant,
est parsemée de quelques fragments de douceur, quelques ténus
moments d'espoir.
Quand j'ai fermé ce livre, je suis resté sur un arrière-goût
d'amertume, de fatalité injuste. Même s'ils ont une famille,
ces jeunes sont déja seuls dans la vie. Personne pour les entendre,
pour leur donner les codes. Il y a pourtant dans cette galère d'incompréhensions,
de silences, de violences, de beaux moments de solidarité et d'amitié
intenses, qui donnent une raison de vivre. De la vraie camaraderie. Des
temps à saisir et à préserver au fond de son coeur
et de sa mémoire, pour se constituer un trésor qui donnera
peut-être à ces deux jeunes de pouvoir s'inventer -et non
subir- une vraie vie. Sans qu'on sache s'ils auront le savoir-faire, la
ressource, la force de la créer meilleure et plus agréable.
Un roman sans complaisance, presque désespéré,
tout en étant plein de force et de vitalité.
Pour garçons et filles à partir de 13-14 ans..
© Jean
TANGUY 11 janvier 2004 |