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Mis à jour le 09 mai 2012
Fais-moi peur
  Fais-moi peur
Sombres citrouilles
  Sombres citrouilles
Minuit-Cinq
  Minuit-Cinq
Chaque soir à 11 heures
  Chaque soir à 11 heures

Fais-moi peur

Un roman de Malika Ferdjouk, édité à L'Ecole des loisirs en 1995,
dans la collection Médium.

Fais-moi peur Monsieur N. est dessinateur de bandes dessinées. Il mène une vie très solitaire, emploie une femme de ménage qu'il renvoie d'une manière bassement raciste, possède un chien qu'il méprise et va tuer un soir de décembre, juste avant Noël. On pressent que ce personnage est dangereux...
Le même soir, le docteur Mintz et Madame vont à la ville laissant pendant quelques heures leurs enfants à la garde de l'aînée qui n'a que treize ans.
Les Mintz forment une famille très unie, chaleureuse et vivante. Ils habitent une maison individuelle au milieu d'un jardin, ont des voisines qui passent leur temps à les espionner, un chat qui porte sept noms, autant qu'il y a d'habitants dans la maison, une horloge qui sert de cabine téléphonique aux enfants, une grand-mère très intuitive.
Par un enchaînement de circonstances, Monsieur N. acquiert la certitude qu'un des enfants Mintz l'a vu tuer son chien au bord de l'étang voisin. En plus, il s'aperçoit que la jeune Radiah, la fille de son ancienne employée, est amie des Mintz et fréquente Gabriel, un jeune aveugle qu'il méprise profondément.
Monsieur N. décide donc d'éliminer tous les enfants...


Voila un vrai thriller, qui commence avec plein d'humour et continue comme un roman de Stephen King. Le suspense est continu jusqu'à la dernière page. L'angoisse s'installe peu à peu, insidieusement, le lecteur étant régulièrement distrait par les agissements épiques de la petite famille, la chronique de l'amour naissant entre Radiah et Gabriel, les commentaires de l'auteur sur ce qui se passe... Le roman est bien construit, il mélange les genres avec bonheur, passant de moments angoissants et de la violence mauvaise et perverse à de belles pages sensibles sur les perceptions du jeune aveugle. On s'amuse des voisines indiscrètes et on envie la coexistence pacifique de Radiah l'algérienne et des Mintz qui sont juifs. On s'amuse à la description de cette famille folklorique pourtant si ordinaire et on est attentif à la leçon morale sur la persistance du mal dans l'histoire de l'humanité, le mal toujours à vaincre...

Le livre est plutôt long, ce qui laisse le temps à l'histoire. C'est une aubaine parce qu'il est bien fait, qu'il fonctionne bien. Il est bien plus intéressant que les "Chair de poule" dont raffolent les onze-treize ans, et moins long et moins pervers que d'autres romans d'angoisse. Un livre à lire, vraiment...

 © Jean TANGUY   24 juillet 2000      

Sombres citrouilles

Un roman de Malika Ferdjouk, édité à L'Ecole des loisirs en 1999,
dans la collection Médium.

Sombres citrouillesChaque année, le 31 octobre, Mamigrand réunit la famille Coudrier à la Collinière, pour l'anniversaire de Papigrand. C'est un rite qui se répète de façon immuable chaque année. Il ne viendrait à personne l'idée de s'y soustraire.
Les voisins étant américains, Mamigrand a envoyé les petits leur chercher des citrouilles au jardin. Mais c'est un cadavre qu'ils trouvent. Un homme mort, avec des taches rouges partout. Ils ne le connaissent pas, alors ils le cachent, avec l'idée d'en parler plus tard, pour ne pas gâcher la fête. Seulement, ces petits sont des malins. Leur conduite et quelques hasards vont provoquer quelques rebondissements.
On verra que la jolie australienne n'est pas si amoureuse que l'on pouvait croire, que Colin-Six ans risque la mort par affection pour son renard, que Mamigrand cache bien son jeu, que Papigrand n'est pas si courageux, ni très fidèle, que Madeleine devrait écouter Hermès, qu'Edith n'avait pas intérêt à s'enrhumer, que Dimitri a certainement beaucoup souffert, qu'oncle Gil aussi craint Mamigrand... Que dans ces familles si respectables, il se passe de drôles de choses...


La nuit d'Halloween, les enfants masqués demandent des bonbons aux gens qui ne peuvent cacher leurs sentiments. Ils dévoilent quelque chose d'eux-mêmes. Cette année-là, chez les Coudrier, les enfants font tomber les masques. Les sentiments vrais apparaissent : amour, et haine, courage et lâcheté, tolérance ou rigueur morale, bonté ou indifférence. Enfin la vie qui se tenait bridée, peut enfin éclater, comme un feu d'artifice. On peut se laisser aller, se dire, respirer, être tel qu'on est sans devoir se cacher. La vérité éclate.
La vision de la famille que nous offre Malika Ferdjouk dans ce roman n'est pas positive. La famille étouffe, bride, empêche l'épanouissement des êtres. Il faut se libérer de son carcan. On peut aussi voir qu'il faut du courage pour s'affirmer, que la liberté se conquiert. Et qu'on peut vivre et s'aimer différents, si on ne se laisse pas intimider par l'autre.
Si certains personnages n'inspirent pas la sympathie, d'autres , au contraire, sont joliment campés : Hermès, Madeleine, Colin-Six ans, et les si différentes deux jumelles...

Un regard sévère, un beau roman, une belle écriture, une intrigue resserrée par l'utilisation de plusieurs narrateurs. Un beau moment de lecture.

C'est dans la collection Médium, donc pour des lecteurs affirmés de 13-14 ans et plus.

 © Jean TANGUY   24 août 2002      

Minuit-Cinq

Un roman de Malika Ferdjouk, édité à L'Ecole des loisirs en 2002,
dans la collection Neuf.

Minuit-Cinq Minuit-Cinq est un petit bonhomme de dix ans qui vit dans les rues de Prague. Il tient son nom d'un tatouage sur l'avant-bras, un tatouage raté. Il a une petite soeur, Bretelle qui collectionnent les boutons. Avec Emil, un dompteur de souris, ils forment une petite bande qui chine, à la recherche de quoi survivre, de quoi coucher au chaud le soir. Ils ne se lavent jamais, s'habillent de guenilles.
A la veille de Noël, ils apprennent qu'on a volé le collier de diamants de la princesse Danilova, et qu'il y aura une forte récompense à qui le retrouvera. Sans attendre, ils se mettent à la recherche de fabuleux collier.
En arpentant les rues de la ville, ils rencontrent un théâtre et cherchent à se faire embaucher. Mais Bretelle, toujours aux aguets, a repéré qu'un fiacre élégant traverse leur misérable quartier. Quelque chose l'intrigue. Elle le suit. Elle voit un élégant monsieur en descendre et cacher un objet qui scintille derrière la statue de saint Procope.
Serait-ce le fameux collier ?


Un joli conte déja publié dans la revue Je Bouquine, n° 214, décembre 2001, qui ne perd rien à être publié dans cette collection (trop souvent, les romans publiés par Bayard dans la collection Je Bouquine, perdent à ne pas être accompagnés des illustrations en couleurs de l'édition originale).
L'action se passe à Noël, à Prague, dans le froid, chez des pauvres. En trouvant le collier, les enfants peuvent devenir riches (enfin, un peu), mais ce sont des personnes dignes, qui refusent de se laisser corrompre par les riches de la ville. Ils préfèrent refuser la récompense, plutôt que de devoir justifier leur acte honnête face à un comte qui est un vrai escroc. On voit par là que l'on peut être de noble extraction et plutôt enclin à la malhonnêteté. Tout de même, car il faut bien que la morale triomphe, les enfants seront récompensés d'une autre façon, parce qu'ils restent fidèles à leurs nouveaux amis du théâtre itinérant.
Tout ceci se termine bien, dans la bonne humeur et le bonheur partagé.

Une histoire agréable, chaleureuse, tout à fait dans la tonalité de Noël, écrite avec la vivacité et la simplicité auxquelles Malika Ferdjouk nous a habitué.
On pourrait lire cette histoire à des jeunes enfants de 8-9 ans. Pour des lecteurs dès 10 ans.

 © Jean TANGUY   23 décembre 2002      

Chaque soir à 11 heures

Un roman de Malika Ferdjouk, édité chez Flammarion en 2011,
dans la collection Emotions.

Chaque soir à 11 heuresWilla Ayre vit avec sa mère. Elle voit son père de temps à autre qui la transporte en quelque part, tout en lui présentant une Samantha ou une Jennifer. Sa mère, Catherine Ayre, s'occupe de trouver et produire des miss un partout dans le monde. Willa est donc souvent seule. Elle passe beaucoup de temps avec Flannagan, son saxophone, et avec une très bonne amie, Fran Hilbert, la sœur de Iago, avec qui elle a une jolie histoire d'amour.
Justement, ce soir-là, elle est invitée à l'anniversaire de Fran, dans le luxueux hôtel dont ses riches parents sont propriétaires. Elle fait connaissance d'un curieux jeune homme, Edern, bourru et peu bavard. Au cours de la soirée, elle se demande pourquoi Iago se montre distant et s'il n'y a pas quelque chose entre une serveuse,
Rosemonde, et lui. On verra qu'il y a effectivement quelque chose qu'elle n'imagine pas.
Mais c'est Edern qui l'intrigue vraiment. Elle se renseigne sur lui, le suit jusqu'à sa maison, Fausse-Malice, nichée au fond d'une impasse. Elle s'introduit dans la famille pour faire de la musique avec Marnie, la sœur de Edern. Elle apprend que la famille est liée à un laboratoire pharmaceutique et qu'elle a vécu une tragédie. Il y a des secrets qu'elle va découvrir, par exemple, pourquoi, chaque soir, la pendule s'arrête à onze heures. Mais ce sont de terribles secrets...
Pendant tout ce temps où elle fouine dans l'entourage de la famille, elle est victime d'accidents étranges et pense que Iago en est le responsable.
Ce en quoi elle se trompe beaucoup... 


On s'attend à un roman chick-litt, une histoire de gosses de riches avec une gentillette histoire d'amour. Eh bien non ! ça vire très vite thriller.
C'est écrit avec beaucoup de légèreté, de pirouettes, d'inventions de mots. Willa est une jolie personnalité, équilibrée, qui prend le temps de réfléchir, qui vit bien entre ses deux parents sans se laisser piéger par l'un ou l'autre. Elle aime Iago, puis Edern, sans se départir d'un réel recul critique. Elle est curieuse, ne s'en laisse pas conter et veut savoir ce qu'on lui cache.
Les personnages secondaires sont intéressants, que ce soit ses parents, son amie Fran, très gosse de riche, le sombre Edern, sa sœur Marnie et ses jolies inventions de langage...
C'est un très bon roman, à la fois thriller et histoire romantique, avec plusieurs intrigues. Si un peu de paillettes ne nuit pas à ce genre d'histoire, ici, on pourra trouver qu'il y en a trop. La famille Hilbert ne se montre pas sous son meilleur jour.

Ce roman m'a rappelé le Fais-moi peur publié à L'Ecole des Loisirs en 1995. La même sensation de s'embarquer dans une histoire alors qu'on est dans une autre, la même vivacité d'écriture et le plaisir de lire qui va avec, la même ambiance pas vraiment crédible si on prend du recul, mais à laquelle on succombe. Sauf que Fais-moi peur est plus angoissant et qu'il n'y a pas d'amour, ni de saxo...
Ce n'est pas un grand roman qui se prend au sérieux, mais c'est excellent...
Pour des lecteurs dès 12 ans.

 © Jean TANGUY   5 décembre 2011