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La danse interdite |
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Le garçon qui aimait les bébés |
La danse interdite
Un roman de Rachel Hausfater-Douieb, aux éditions Thierry Magnier, 2000,
dans la collection Roman.
Dans un petit village de Pologne, avant la Deuxième Guerre mondiale.
Perla, une jeune juive, s'éprend de Wladeck, un garçon aux yeux bleus. Il était clair, et moi j'étais trop sombre. Mais pourtant c'était moi la lumière, et lui la nuit, moi la douceur, et lui le crime. Leur amour est très fort, ils n'ont peur de rien surtout pas des préjugés. Mais quand la mère de Perla les a séparés, quand elle l'a expédiée aux Etats-Unis rejoindre son père, il n'a pu rien faire.
Sur le bateau, elle comprend le contenu de la lettre destinée à son père et qui contient son adresse, puis la laisse s'envoler. Elle découvre qu'elle est enceinte. Grâce à la complicité d'une famille, elle peut débarquer et travailler dans un atelier de confection. Quand son fils naît, elle lui donne le nom d'Adam, avec lui est né son nouveau monde.
Marchand dans Brooklyn, elle découvre un magasin de pianos. Elle s'y fait embaucher comme "frappeuse" pour jouer les partitions qui sont à vendre.
Quand Adam commence à parler, il lui demande qui est son père, son père a elle, ce qui lui donne l'idée de chercher à se faire embaucher comme pianiste dans un théâtre où les émigrants juifs se regroupe pour des soirées de solidarité. Jouant une mélodie que lui chantait son père, elle finit par le retrouver. Il vit dans la misère, ayant perdu tout espoir de revoir sa fille qu'il sait en Amérique depuis plusieurs années. Ils renouent lentement, reconstruisant leur histoire, leur famille.
Comme elle a vu que son père n'a pas les moyens de faire venir le reste de la famille, Perla s'y emploie. Elle prend le bateau pour la Pologne. Elle part pour un été. L'été 39.
Pendant ce temps, son père a envoyé à sa femme l'argent nécessaire au voyage de la famille vers l'Amérique. Perla arrive trop tard. Car nous sommes des gens impossibles. Une stupide famille de "secreteurs", chacun dans son coin occupé à couver ses petits rêves, ressasser ses gros chagrins, et préparer ses coups d'éclats.
Le lendemain, les Allemands envahissent la Pologne. Perla est enfermée dans le ghetto de Lublin. Elle a juste eu le temps de jeter son fils dans les bras de Wladek, certaine qu'avec lui il vivra. La vie dans le ghetto est terrible, dure, cruelle. Seule la passion pour ceux qu'elle aime lui donne la force de tenir, de vivre, de s'élever au-desus de la boue et du sang, de tirer sa vie vers le haut...
L'année suivante, Wladek réussit à faire sortir du ghetto avant qu'il ne soit liquidé, à lui faire quitter la Pologne, avec Adam, pour l'Amérique...
Cette famile constamment dispersée n'est pas si extraordinaire dans notre vingtième siècle, hélas. L'histoire aurait pu être plate et tout simplement noire, comme le récit administratif d'un enchaînement de retrouvailles manquées. Mias l'écriture la transfigure en une douloureuse et tragique époquée dans cette terrible période de la deuxième guerre mondiale. Car si on dépasse la préciosité de la langue, on lit un texte magnifique et poétique, qui laisse entrevoir l'espoir, l'inaccessible espoir d'une vie de paix et de calme. Le style et l'usage de la première personne permettent à Perla de masquer le caractère abominable et insoutenable de certaines situations : l'arrachement des séparations, la vie dans le ghetto. La vie alors est un combat, une survie, un exploit continuel, un affrontement du mal absolu. Puis viennent des moments exaltants, des retrouvailles, des départs pour retrouver son père ou son amour.
Perla est une jeune femme courageuse, qui puise dans l'amour qu'elle porte pour son fils et pour Wladek, la force de vivre, de lutter, de vaincre. Elle ne cache pas la barbarie des soldats allemands, mais elle n'est pas haineuse. Malgré la peur, le froid, la faim, elle ne désespère pas, elle continue de lutter, d'agir, de vivre.
Et toujours, cette belle écriture qui fait ressentir combien l'absence de Wladek lui est douloureuse, combien il lui manque, combien est grande son espérance de le retrouver, pour toujours.
Un beau texte, vraiment, plein de courage et d'espoir.
Pour tous les adolescents, dès qu'ils sont en mesure de supporter la dureté des situations.
© Jean TANGUY 15 septembre 2001
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Le garçon qui aimait les bébés
Un roman de Rachel Hausfater-Douieb, aux éditions Thierry Magnier, 2000,
dans la collection Roman.
Quand on est en classe de troisième, on fait souvent un stage dans une entreprise. Martin a choisi de passer une semaine dans une crèche. Dans son entourage, c'est plutôt la surprise et le doute qui dominent quant au sérieux de sa motivation. Martin se résigne à ne rien dire de son amour pour les bébés. Pourtant, ce stage lui a beaucoup plu et il semble avoir fait preuve d'indéniables prédispositions à s'occuper de bébés.
Martin aime aussi Louise. Beaucoup. Tellement qu'après une visite de la maison de Monet, ils se sont perdus dans un champ de blé. Et aimés.
Après, il y a eu... la haine. La haine dans les yeux que j'avais connu si tendres. Louise est devenue distante, lointaine, puis inaccessible quand elle n'est plus sortie de chez elle. Elle est enceinte, elle n'aime pas Martin, ses rêves de passer son bac, de devenir avocate, de vivre en Amérique sont réduits à néant par cette grossesse accidentelle. Sa mère et elle ont décidé, elle accouchera sous X.
Martin est choqué. Parce que lui, il aime les bébés. Parce qu'il a gardé et a vu grandir Léo, le bébé d'une amie, qui est devenu comme son petit frère. Parce qu'il n'y a pas eu... sa soeur, décédée à la naisance. Une soeur qui lui a cruellement manqué.
Comme il n'est pas question qu'il abandonne son bébé, il va à la mairie faire une reconnaissance prénatale. Et il attend la naissance du bébé pour le prendre avec lui. Avec l'aide de sa grand-mère et l'accord de ses parents résignés..
Une évocation sympathique de la fin de l'adolescence et d'une entrée dans le monde des adultes. Le jeune homme affirme ses goûts, pose ses décisions. Ce stage dans une crèche et l'attente de son bébé lui permette de faire le deuil des sa soeur attendue qu'il n'a pas eu.
La première relation sexuelle de Louise et Martin n'est pas sans rappeler celle de Helen et Chris, les héros de Cher Inconnu, un roman de Berlie Doherty. Ils ont la même malchance qu'ils n'assument pas de la même façon. Ici, c'est la jeune fille qui refuse l'enfant et va jusqu'à accoucher sous X, et c'est le jeune homme qui revendique la paternité.
On admirera le courage des deux jeunes. On trouvera cette histoire follement romantique et parfaitement décalée d'une réalité plus brutale où l'administration a le plus souvent le dernier mot. Certes, le vie est belle, mais à ce point !
Il reste que la lecture de ce roman est un moment de douceur et de fraîcheur dont il ne faut pas se priver.
© Jean TANGUY 29 février 2004 |
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