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Mis à jour le 09 mai 2012
 

Black-out

Un roman de Samuel Mills, publié chez Naïve, en 2010,
Traduit de l'anglais par Valérie Le Plouhinec

Black-Out  Ce roman commence par une scène violente. Alors que Stephan Burns écoute un écrivain dans une librairie, il ne peut s'empêcher de lui tirer dessus. Il s'enfuit et se réfugie au bord de la mer, dans une cabane délabrée.
Stephan vit dans un pays où l'on est sous surveillance constante. Il y a des caméras partout, équipées d'une reconnaissance des visages et couplées à un système d'identification. Tout le monde observe rigoureusement les lois, ne fait jamais rien d'interdit, n'hésite pas à dénoncer d'éventuels "Terroristes", prend chaque jour des Pilules de Bonne Conduite.
Dans cette Grande-Bretagne, on ne lit que des bons livres qui ont été "récrits" pour effacer toute scène de violence, de sexe, tout ce qui fait réfléchir, qui rend critique. Car lire des bons livres rend bon, lire de mauvais livres rend mauvais.
Dans le lycée de Stephan, il y a une Cabine de vérité. Un jeune jugé "Terroriste" est envoyé dans l'Institution, où il est rééduqué, éventuellement contraint par la torture, avant d'être envoyé dans une nouvelle famille. Ce qui arrivera à Stephan.
Son père est libraire. Il vend, en cachette, des éditions originales, non "récrites". Il fait partie des Mots, un réseau de résistance constitué surtout d'écrivains et de libraires. Quand le libraire héberge un écrivain interdit, Omar, Stephan se retrouve dans une situation difficile. Il finira par le dénoncer.
Il va alors transiter à plusieurs reprises par l'Institution, parfois sans le savoir, et être amplement manipulé et utilisé pour espionner et détruire le réseau des Mots. Mais la lecture d'une version originale de Sa Majesté des Mouches va réveiller sa conscience. Peu à peu, il va comprendre comment fonctionne l'Etat, prendre goût à la liberté de penser, d'aimer, de lire, réaliser que les pilules lui lavent le cerveau.
Il va comprendre son père et décider de le délivrer de sa prison...


Ce roman d’anticipation peut éclairer notre présent et notre rapport à la littérature. Il oblige à évoquer la vie sociale et politique de notre pays : le recours aux lois, la vidéo-surveillance, le respect de la vérité. Comment ne pas se poser la question des droits fondamentaux, de la liberté de pensée, de l'expression libre et non soumise à une quelconque dogmatique ? Peut-on ou non recourir à la violence pour s'opposer à des abus de l'Etat ? Comment résister ? Où chacun doit-il placer sa limite à la liberté de s'exprimer ?
Par rapport à la littérature, peut-on accepter que des livres soient "récrits" pour notre bien ? La fonction de la littérature doit-elle être cantonnée à "nous faire du bien" ? La censure peut-elle être supportée par la littérature ? La littérature a-t-elle une fonction politique ?

C'est aussi un excellent thriller. Le suspense est constant. Les personnages sont complexes (comme Omar qui est présenté comme homme épris de littérature, ami fidèle du libraire et comme un intégriste musulman pouvant devenir un assassin). Le héros est parfois courageux et droit, parfois lâche et soumis.
Ce roman cite d'autres romans : "1984" de George Orwell, "L’attrape-cœurs" de Salinger, "Sa majesté des mouches" de William Golding.

Excellent roman palpitant pour ados à partir de 14-15 ans, et grands ados-jeunes adultes.

© Jean TANGUY  --  10 février 2011