Un roman de Romain Slocombe, publié chez Syros, en 2008,
dans la collection Rat noir

   Une longue lettre que Paula écrit à Jacques, son fiancé, situe l'histoire. Paula est juive, Jacques est résistant. C'est la Seconde Guerre mondiale. Le père de Paula est un peintre, il a prévu de mettre sa fille à l'abri si les choses tournent mal. Et elles tournent mal, on le sait. Le père de Paula fait sa femme et son fils quitter Paris pour aller se cacher à Lyon. Plus tard, alors que les rafles commencent, ils se cachent d'abord à Belleville, puis partent pour Lyon. Au cours de leur fuite, ils se séparent, Paula continue la route avec deux filles juives. A Lyon, elle retrouve sa mère après un passage dans un foyer de l'Armée du Salut. Puis elles migrent vers le sud.

Après cette lettre, un narrateur raconte le retour à Paris de la jeune fille et les risques qu'elle frôle. Elle ne retrouve pas son père. Ses anciennes amies la rejettent. Elle échappe à un ancien camarade de lycée qui lui a semblé être douteux. Elle retrouve la cache qu'elle a occupé avec son père avant de partir en zone libre.

Plus tard, à l'été 1997, Jacques Masaran va à la rencontre d'une femme qu'il ne connaît pas. Une annonce sur Internet lui a rappelé le souvenir de Paula. Cette vieille femme lui raconte l'histoire tragique de Paula, après qu'elle se soit cachée à Belleville...
Elle lui donne le nom de ce camarade de lycée qui rabattait des Juifs vers les soldats allemands, et qui a donné l'adresse de l'endroit où se cachait Paula. Jacques Masaran retrouve cet homme...

Gros roman de 250 p. comportant une bibliographie de 2 pages. Le texte fait référence à Louise Jacobson, une lycéenne qui a été dénoncée, arrêtée, déportée et qui est morte à Auschwitz. Avant même qu'on ne découvre la bibliographie, on sait que l'auteur s'est documenté. La partie historique est tout à fait fiable.

Ce roman diffère d'autres traitant du même thème par son appartenance au genre du roman noir. Il n'élude aucun des points concernant les Juifs pendant la guerre : la privation de leurs droits, leur mise dans des ghettos, le port de l'étoile jaune, la délation, l'envoi vers les camps de la mort. La façon dont l'auteur narre ces événements, de l'intérieur, avec un calme réalisme les rend sensibles, touche l'intime du lecteur qui en comprend la signification profonde. Le roman montre bien l'inhumanité de cette guerre.

L'alternance des lettres et de la narration rend plus fort le drame de cette jeune femme pleine d'espoir, mais démunie des moyens de diriger sa vie comme elle le voudrait. Les voyages de Paula sont relatés avec de nombreux détails. La chute est inattendue.
C'est une histoire noire, évidemment, mais qui n'est pas à sa place dans cette collection.

Ce gros roman peut être lu par des lecteurs, garçons et filles, dès 12-13 ans.

© Jean TANGUY  --  12 septembre 2011